Comment vivait-on en 1900 ?

Les hommes portent le chapeau melon. Dans les rues, il y a des chevaux, beaucoup de chevaux.   Et, dans les airs, des engins qui essayent de voler. C'est le début de l'électricité et du cinéma. Mais comment vit-on en 1900 ?

1900… Quelle    année ! Nos grands-pères croient qu'un nouveau monde commence. Mais regardons ce qui s'est vraiment passé en France en 1900.

La radio des poumons.

C'est le début de la radioscopie. Le médecin voit enfin à l'intérieur du corps, sans avoir besoin d'opérer. Et il voit surtout les cavernes creusées dans les poumons par une terrible maladie : la tuberculose.

Ce mal est responsable de la moitié des décès, dans les grandes villes, en 1900.

Mais beaucoup de médecins vont payer de leur vie la découverte scientifique qui permet de dépister la tuberculose. Ils sont assis devant un simple meuble de bois. Pendant tout le temps où ils observent leur malade, ils reçoivent des rayons X dans le corps. Comme rien ne les protège contre ces rayons dangereux, ils sont brûlés peu à peu. Certains en mourront.

 


L'Exposition universelle

Avril 1900 : la plus folle des expositions s'ouvre à Paris pour neuf mois. La tour Eiffel est achevée. Il y a onze ans que des architectes se sont lancés dans cette audacieuse construction d'acier.

A Paris, les quais de la Seine et le Champ-de-Mars se couvrent de gigantesques palais. Le soir, on se précipite au 'Palais de la fée Electricité". La façade du Palais ruisselle de lumière, et la tour Eiffel s'illumine. Des ampoules électriques colorées éclairent les fontaines. Personne n'a encore vu cela !

En juillet, on inaugure la première ligne de métro. On court voir le chemin de fer électrique, ce train sans fumée qui file sous Paris à 30 kilomètres/heure. Chacun se prend à rêver du jour ou l'électricité va venir changer la vie de tous les jours, à la maison.

A l'exposition, 50 millions de visiteurs accourent. Ils viennent faire, à Paris, le tour du monde des dernières inventions. Ils découvrent la Lune grâce à la plus grande lunette du monde, un télescope de 120 mètres de haut. Ils assistent aux premières aux premières vraies séances de cinématographe, avec des fils muets de longue durée.

Les bords de la Seine se remplissent de stands d'exposition représentant des pays étrangers. On voit des mosquées, des temples indiens. Il y a même un village suisse, en pleine ville, avec une fausse montagne et de vraies vaches !

La demoiselle du téléphone

Pour téléphoner, en 1900, il faut obligatoirement passer par "la demoiselle du téléphone". C'est elle qui vous relie à votre correspondant. On ne peut pas obtenir directement le numéro que l'on désire.


 

Il n'y a dons pas de cadran ni de chiffres sur le lourd téléphone noir dont on dispose à la maison. Il y a une belle manivelle, pour faire venir le courant !

On compte, en France, 7 téléphones pour 10 000 habitants. L'abonnement coûte cher, et ces drôles d'appareils dont un peu peur.

Les artisans

La rue est pleine de cris : " Vitrier ! Ramoneur ! Chiffonnier !" Les artisans travaillent dans la rue, avec leur atelier installé sur une charrette. Le chiffonnier tire son âne. Il passe chez les couturiers et chez les tailleurs pour récupérer les bouts de chiffons et pour les vendre à une fabrique de papier. Le bohémien vagabond, appelé le romanichel, fabrique ses paniers aux carrefours. Aujourd'hui ici, demain ce sera ailleurs.

Le rétameur pose une pièce de métal à la casserole trouée. Le réparateur de porcelaine met une couche d'émail au fond de la cuvette trouée.

En 1900, rien ne se jette. Tout se fabrique en solide et se réutilise. De nombreux artisans vivent ainsi, plus ou moins bien, de la réparation des objets que l'on utilise tous les jours.

Le premier tapis roulant

IL y a foule à Paris, par ce bel après-midi de printemps, pour essayer le dernier cri de la technique : ce tapis électrique en bois qui roule. Il enjambe les rues et mène à l'Exposition universelle. Son nom ? La rue de l'Avenir.

Les dames se protègent du soleil sous leurs ombrelles et leurs grands chapeaux. Il est vraiment très mal vu d'oser se promener en ville, tête nue. Avec les beaux jours, les messieurs ont laissé le melon pour le chapeau de paille, appelé canotier.

Dans la rue, le cheval est roi. Trois chevaux tirent l'omnibus sur des rails, car la voie n'est pas encore électrifiée. Le cocher grimpe avec quelques voyageurs sur l'étage supérieur qu'on appelle l'impériale. Les taxis sont des fiacres décapotables à quatre roues, menés par des chevaux. Paris sent le crottin.

Sur la façade des beaux immeubles, un écriteau signale le dernier confort : "Eau et gaz à tous les étages." L'eau n'et pas toujours à chaque évier, mais elle est disponible à chaque palier. Dans les beaux appartements, on s'éclaire au gaz de ville. Ce soir, l'allumeur de réverbères va passer dans la rue pour ouvrier et allumer les becs de gaz. Demain matin il viendra les éteindre.

Les petites filles de bonne famille portant des rubans dans les cheveux et des robes blanches. De longues boucles leur descendent en spirale dans le dos ; c'est la mode des "anglaises".

Ce petit garçon porte la large casquette des gamins des rues parisiens. Il est vendeur de lacets. La loi interdit le travail des enfants à l'usine. Mais, dès la fin de l'école primaire, beaucoup d'enfants exercent un métier.

L'idée ne vient à personne d'aller acheter ses lacets dans les grands magasins, car il en existe très peu. De toute façon, chacun trouve dans la rue tout ce qu'il veut acheter.

 

Les vendeurs des rues n'habitent pas au centre des villes, la vie y est trop chère. Autour de Paris, des baraques de bois et de ferraille abritent ceux qui se nourrissent des petits métiers de la grande ville.

Le ballon et l'aéroplane

Des hommes courant dans un champ. Quand ils vont lâcher les câbles du ballon, il s'envolera.

La manœuvre est délicate : ce ballon sans moteur retombe n'importe où, et le moindre obstacle peut le faire exploser, car il est rempli d'un gaz dangereux : l'hydrogène.

En 1900, seuls ces ballons très légers volent. Tous les savants disent : "Ce qui est plus lourd que l'air ne peut voler".

Il faut attendre 1903 et l'avion des frères Wright pour parcourir 30 mètres, à 4 mètres du sol, pendant douze secondes. Un exploit !


 

Après 1903, de plus en plus d'aviateurs s'embarquent sur ces curieuses machines à voler qui ressemblent à celle que l'on aperçoit ici devant le ballon. Ce sont des aéroplanes, des avions qui volent enfin pour de bon.

L'automobile

Les choses sérieuses commencent pour l'automobile. 1899, c'est l'année du premier permis de conduite obligatoire et de la première voiture de course qui atteint 100 kilomètres/heure : "La jamais contente". Son moteur électrique est vite à court d'énergie. Ce monstre d'acier pèse 3 tonnes et ses freins ne l'arrêtent pas. Elle a beau être équipée des tout nouveaux pneus gonflables, elle ne tient pas la route sur les pavés. Bref, tout ça n'est pas encore vraiment au point ! La voiture passionne une poignée de sportifs aventureux.

La vitesse est une idée toute neuve !

Le Vélo

Depuis vingt ans, le vélo révolutionne la vie. A la campagne, il permet de quitter le village et d'aller à la gare la plus proche. Mais il coûte deux mois de salaire d'un bon ouvrier, c'est-à-dire l'équivalent de 10 000 de nos francs d'aujourd'hui. C'est dans trois ans seulement que le premier tour de France va prendre le départ.

Les vacances au bord de la mer

Les familles fortunées peuvent prendre des loisirs au bord de la mer. Elles s'offrent le voyage jusqu'à la côte normande, en voiture ou par le chemin de fer. Le train existe depuis cinquante ans. Il roule à 100 kilomètres à l'heure.

Sur la plage, de rares privilégiés découvrent la joie de se baigner. Ils se baignent pour se détendre et non plus pour se soigner, comme on le faisait auparavant. Ces femmes brodent sur la plage, un foulard noué autour du chapeau. La mode est aux bains habillés et à la peau blanche comme du lait.

Les aventuriers qui ont de l'argent s'embarquent pour de longues et luxueuses croisières sur les tout nouveaux paquebots à vapeur. Ces navires géants remplacent peu à peu les voiliers. L'Atlantique se traverse maintenant en dix jours, par tous les vents.

A la campagne

Les hommes travaillent aux champs, les femmes, en grand tablier, s'activent à la ferme. Les enfants jouent, en sabots, dans la cour en terre battue. Il est impossible de distinguer les garçons des filles, car les vêtements passent des uns aux autres ! Le petit dernier apprend à marcher seul, dans un support en bois monté sur des roulettes. La grand-mère regarde par la porte entrouverte : trois générations vivent ici de la terre.

En 1900, plus de la moitié des français habitent à la campagne. Pourtant la vie est dure pour les petits agriculteurs. Ils mangent mal, même s'ils mangent à leur faim, un peu de soupe au lard le matin, du cochon, du chou et des pommes de terres aux autres repas. La volaille du poulailler finit rarement dans l'assiette ; le poulet est un plat de luxe qu'on va plutôt vendre au marché.

Certains paysans vivent entre eux, avec pour seuls visiteurs, le facteur qui apporte les nouvelles, et le boucher qui vient tuer le cochon.

Cinq événements importants rythmes la vie : la noce et l'enterrement ; la foire du canton où on vend la production de la ferme ; la fabrication du savon avec tout le village, une fois par an. Et puis le service militaire ; il est devenu obligatoire pour tous. C'est la seule occasion de quitter sa région et de parler autrement qu'en patois, la langue de sa province.

Dans la chaleur de juillet, les paysans se rassemblent pour battre le blé. Un gros propriétaire loue sa batteuse mécanique toute neuve à plusieurs villageois. Une belle batteuse reliée à une machine à vapeur par des courroies ! Mais, dans bien des endroits, on continue de séparer, à la main, la paille et les grains de blé.

Les progrès de la ville arrivent dans les régions les plus riches du pays. Là, le paysan récolte pour vendre, et pas seulement pour manger. La vie change.

Les poudres contre les insectes nuisibles améliorent les rendements. Les engrais permettent enfin de cultiver le sol sans qu'il soit nécessaire de la laisser au repos, pendant une saison.

Dans les fermes "modernes", les habitudes bougent ; la cuisinière en fonte remplace le feu de cheminée. La bougie laisse la place à la lampe à pétrole. La machine à coudre va bousculer peu à peu la façon de s'habiller : les petits garçons commencent à porter des pantalons, et les filles des robes.

Le paysan, dans son costume des jours de fête ressemble de plus en plus au bourgeois de la ville. Le dimanche, il abandonne ses sabots pour des souliers de cuir.

Les industries

L'ouvrier travaille beaucoup : souvent jusqu'à 12 heures par jour, 6 jours par semaine, et 300 jours par an. Il vit dans la peur de tomber malade car, alors, il cesserait d'être payé. Il ne connaît ni les vacances ni les congés payés et, quand il sera vieux, il n'aura pas forcément de quoi payer sa retraite. Le samedi soir, après son travail, il va prendre son unique douche de la semaine, aux bains publics. Le dimanche est son seul jour de repos.

Le temps du forgeron qui tape sur un morceau de métal, seul devant sa forge, touche à sa fin. Des ouvriers fabriquent maintenant les pièces de charrue dans les usines. Certaines usines possèdent maintenant une machine à vapeur. La conserve vient de naître dans l'alimentation.

Une loi, en cette année 1900, interdit d'employer des femmes plus de 10 heures par jour. Mais leur mari gagne 5 francs par jour, s'il est bon ouvrier : pas de quoi loger et nourrir la famille ! Certaines femmes touchent 1.50 francs par jour, le prix de 2 kilos de pain et d'une litre de lait.

Les ouvriers réclament "8 heures de travail, 8 heures de repos, 8 heures de loisir par jour", ils les obtiendront quelques années plus tard, en 1919.

La salle de classe

L'école n'a pas toujours été ouverte à tous. En 1881, le ministre Jules Ferry la rend gratuite et obligatoire de 7 ans à 12 ans. Le gouvernement forme et paye les instituteurs. Tout français doit apprendre à lire, compter et écrire.

Pas de fantaisie dans la classe. L'élève porte une blouse noire boutonnée dans le dos, et le meilleur de la division reçoit la croix d'honneur sur la poitrine.

La maîtresse donne le cours de morale : "Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fit". Bonne occasion d'apprendre en même temps l'imparfait du subjonctif : "fit". On va à l'école 6 heures par jour, sauf le jeudi.

L'examen du Certificat d'études termine de solides études primaires. Le candidat doit réussir sa dictée avec moins de cinq fautes. Il écrit d'une écriture penchée, à l'encre violette et au porte-plume. Il récite par cœur les départements, les préfectures et sous-préfectures, les fleuves et leurs affluents, les dates de l'histoire de France.

Le lycée est payant : il est plutôt réservé aux familles riches. Et rares sont les filles qui y ont droit. Souvent, elles vont dans des institutions privées, où elles apprennent surtout la broderie et la cuisson des confitures.

 

En 1900, la France possède le deuxième empire colonial du monde, après les Anglais. Voici ses possessions : L'Afrique occidentale française, l'Algérie et la Tunisie, l'Ile de Madagascar, l'Ile de la Réunion, l'Indochine, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie, la Guyane, l'Ile de Saint-Pierre et Miquelon et les Antilles.

Extrait des dossier de l'Histoire - Janvier 1986